Vers un numérique innovant et vertueux

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Emploi Tech en Bretagne et Pays de la Loire : vers une maturation du marché ?

IA, quête d’experts, place des profils juniors… Le secteur du numérique de l’Ouest est en pleine mutation. La dernière enquête de l'Observatoire Régional des Compétences Numériques, menée par ADN Ouest en 2025 à partir d’une série d’entretiens qualitatifs, explore les ressentis, les doutes et les opportunités autour de l’emploi numérique en Bretagne et dans les Pays de la Loire.

Après la période d’hypercroissance et d’euphorie post-COVID, entre 2021 et 2023, le marché de l’emploi numérique semble entrer dans une phase de stabilisation. Globalement, il ressort de la série d’entretiens, tant en Bretagne que dans les Pays de la Loire, que ce ralentissement qui n’est pas perçu comme une crise majeure, mais plutôt comme un retour à la normale nécessaire pour consolider les projets.

Ainsi, à Nantes, si les grands comptes ont réduit leurs besoins, entraînant un effet domino sur les Entreprises de Services Numériques (ESN) surtout les plus petites, l’écosystème reste jugé solide et résilient. À Rennes, après le « boom » des années passées, si les acteurs constatent un ralentissement, certaines spécialisations techniques du territoire tirent leur épingle du jeu — cybersécurité, test, infrastructure — et plusieurs entreprises ont même embauché davantage en 2024 qu’en 2023. 

Un rééquilibrage de la relation employeur-candidats

Ce réajustement a un impact direct sur la relation employeurs-candidats. Les employeurs ont notamment le sentiment de recevoir davantage de candidatures spontanées, de disposer d’un vivier plus important et plus qualitatif. Résultat : le sentiment de pénurie pour certaines compétences, notamment pour les développeurs Bac+2 ou Bac+3, recule. La surenchère salariale et les exigences exorbitantes des candidats constatées les années précédentes s’estompent, à part pour certains domaines de niche et expertises pointues. Tant en Pays de la Loire qu’en Bretagne, les profils d’experts en cybersécurité, d’experts en data-IA et d’administrateurs ou d’architectes, réseaux expérimentés, restent très recherchés et sont souvent difficiles à trouver.

Des pratiques de recrutement mieux maîtrisées

En 2024-2025, les entreprises du numérique reprennent la main sur leurs recrutements. Finie la frénésie des années de pénurie : place à des pratiques plus structurées. Les employeurs privilégient le recrutement plus direct, les relations partenariales avec les écoles, le développement d’organismes de formation interne, etc. Le recours aux cabinets de recrutement paraît moins fréquent, sauf pour les profils très stratégiques.

L’ouest toujours attractif

À Rennes, l’attractivité du territoire reste perçue comme un atout pour faire venir des talents et les fidéliser, comparativement à des secteurs plus ruraux, qui doivent tester de nouvelles méthodes (espace de coworking dans une grande ville, aménagement soigné des locaux, choix du site de travail parmi plusieurs emplacements…). Certains acteurs rennais interrogés soulignent même l’attrait croissant des candidats et collaborateurs pour d’autres villes bretonnes au cadre de vie attrayant, comme Brest, Lorient ou Quimper.

À Nantes, l’attractivité du territoire est perçue comme un atout essentiel pour attirer des talents et les fidéliser, même si certains acteurs pointent une image écornée de la ville qui a pu dissuader, à la marge, certains candidats. Ce qui pourrait bénéficier à la Vendée : les acteurs interrogés ont le sentiment que des candidats de « grandes » villes sont aujourd’hui plus enclins à venir s’installer à La Roche-sur-Yon ou aux Sables-d’Olonne.

Les juniors et alternants : victimes de la sélectivité ?

Cette sélectivité accrue a des conséquences directes pour les jeunes diplômés et les alternants. Décrocher un CDI à l’issue d’un contrat devient plus difficile. Les écoles confirment que les entreprises, qui sont redevenues exigeantes, privilégient des profils déjà opérationnels. Certaines réduisent donc leur politique d’alternance en début de cursus et promeuvent plus activement la poursuite d’études jusqu’au Bac+5 pour améliorer l’employabilité des jeunes.

Un attrait hétérogène pour les profils en reconversion

Les entreprises utilisatrices bretonnes se montrent toujours ouvertes aux profils en reconversion, surtout dans le secteur industriel ou agroalimentaire. En Pays de la Loire, si les Entreprises de Services Numériques hésitent à miser sur ces profils, certaines témoignent d’un intérêt sur des postes de technicien ou d’administrateur support et mentionnent parfois des volumes importants au sein de leur équipe.

IA et numérique responsable : entre intentions et réalités

L'IA, passage obligé mais adoption tâtonnante : si toutes les entreprises perçoivent l'IA comme incontournable pour la productivité et l'innovation, peu maîtrisent concrètement son déploiement. Cette situation génère une "shadow IA" : des collaborateurs qui s’emparent des outils avec des usages non encadrés. 

Côté métiers, l’IA rebat les cartes sans tout balayer : elle automatise les tâches répétitives, mais valorise les compétences critiques, stratégiques ou transversales. De nouveaux rôles émergent : développeurs IA, chefs de transformation IA, ML engineers… Cette transformation soulève aussi des alertes éthiques : biais algorithmiques, dépendance excessive, confidentialité des données ou impact écologique. L’IA n’est pas un produit miracle. Elle demande du temps, de la réflexion, de la formation… et un vrai sens critique.

Le numérique responsable gagne en prégnance sans encore créer de demande explicite de postes dédiés. Perçu comme une compétence transversale, il s'intègre progressivement dans les cahiers des charges d'appels d'offres. En Bretagne, l'engagement varie selon les acteurs : des grands groupes déjà labellisés aux entreprises agroalimentaires qui jugent négligeable l'empreinte IT face à leurs activités principales.  En Pays de la Loire, l'engagement apparaît globalement plus important qu'en Bretagne, avec un écosystème nantais particulièrement sensible, porté par les politiques volontaristes des collectivités (Métropole, Région). Si les grands groupes structurent déjà leurs feuilles de route RSE, certaines entreprises industrielles estiment négligeable l'empreinte IT face à leurs activités principales.
 

Vous voulez en savoir plus sur les dynamiques du marché de l’emploi numérique dans l’Ouest, les attentes des acteurs du numérique, les défis de la formation, les enjeux de féminisation du secteur et les perspectives d’intégration de l’IA ? 

Rendez-vous sur ADN Library pour découvrir le rapport complet de l'enquête 2025.

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